Depuis samedi 15 juin, des dizaines d’activistes pour la protection du vivant ont débuté l’occupation du Bois de Ballens dans le canton de Vaud. Lieu hautement stratégique dans le grand jeu capitaliste des grands cimentiers pour ses sous-sols riches en graviers, le Bois de Ballens est aujourd’hui menacé par leurs véléités extractivistes et écocidaires. Pour cause : sous cette forêt, et les écosystèmes qu’elle habrite, se trouve le plus grand gisement de sable et de gravier du canton, soit 18,5 millions de m3. Depuis des années, les géants Holcim et Orlatti se disputent ce bois du Pied du Jura vaudois au nez et à la barbe de la population locale qui voit déjà sa région détruite jour après jour par leur insatiable et égoïste appétit : expropriations de terres et de paysans à Yens et à Saubraz, destruction de la forêt au dessus de Bière, noyautage insupportable des pouvoirs judiciaires, etc. Le bois de Ballens représente une entreprise économique majeure pour Holcim et Orllati. La future plus grosse carrière du Canton, entre l’extraction des matières premières et le futur enfouissement des déchets d’excavation, représentera au total une valeur approximative d’un milliard de francs qui iront dans la poche de ces grosses entreprises. Nous combattons la marchandisation des espaces naturels, les transformant en trou stériles pour l’amour du profit. Nous nous levons désormais pour dire NON à un nouveau trou dans le Pied du Jura et nous vous invitons dès à présent à nous rejoindre.
Au-delà de la lutte pour le Bois de Ballens, cette occupation symbolise la lutte du vivant contre l’hégémonie du béton dans la construction en Romandie, en Suisse et dans le monde.
Le béton, industrie la plus polluante de Suisse, domine le secteur de la construction depuis l’après guerre. Cette industrie émet 8% des emissions de CO2 (plus que l’aviation), supprime des écosystèmes complexes entiers et sabote le vivant. Alors que de nombreuses solutions existent, l’intérêt financier de ce matériau et les bénéfices qu’il représente pour les entreprises, empêchent un réel changement pour un secteur de la construction moins émetteur de CO2.
En 2025, le Plan d’Affectation des Carrières (PDCar) sera rediscuté par le Grand conseil. Pour les 10 prochaines années, il déterminera tout les forêts, les collines et les champs qui disparaitront dans la boulimie extractiviste des deux mastodontes industriels dont le business modèle est tout simplement la destruction de nos terres. Après des années de gaspillage dans des projets inutiles et imposés à la population sans son consentement, le Canton de Vaud fait face à une “pénurie de gravières”. Les discours institutionnels sont désormais bloqués derrière la seule possibilité d’ouvrir de nouvelles carrières. Or, nous souhaitons faire entendre une autre voix.
Le 13 juin, le Conseil d’État a communiqué sur le contre-projet à l’initiative Mormont, décevant l’ensemble des personnes un peu sérieuses qui réfléchissent à la réduction du béton. Aucune mesure ambitieuse et réaliste n’y est planifiée. Il est grand temps de tirer le frein d’urgence à l’industrie destructrice et polluante du béton. Nous exigeons le décret de la protection du Bois de Ballens par les autorités et l’adoption d’un moratoire sur l’ouverture de nouvelles carrières en attendant que le Canton prenne au sérieux la réduction massive du recours au béton :
→ En maximisant l’utilisation de matériaux bio et géosourcés et en abandonnant progressivement le béton de ciment par des mesures concrètes et ambitieuses
→ En favorisant la rénovation et l’utilisation du bâti plûtot que de toujours démolir pour reconstruire de nouveaux bâtiments pour répondre aux besoins de l’habitat
→ En favorisant l’utilisation des espaces vides et non utilisés, ainsi qu’en permettant une justice sociale dans nos espaces bâtis par la juste répartition de ceux-ci
→ En interdisant la spéculation immobilière qui attise la pénurie de logements
→ En taxant spécifiquement la production de ciment
En outre, nous revendiquons du Canton la création d’un observatoire indépendant de l’accaparement des terres par les cimentiers et le décret de la fin des travaux sur la colline du Mormont. Nous dénonçons que le Conseil d’État n’ait même pas prévu d’inscrire la protection du Mormont dans la Constitution. Nous relayons finalement la revendication de l’Entraide protestante suisse et de l’organisation indonésienne Walhi pour qu’Holcim réduisent leurs émissions de CO2 de 43% d’ici 2030 et de 69% d’ici 2040 par rapport à 2019 afin d’atteindre un taux d’émission nul d’ici 2050. Celles-ci ont adressé une plainte climatique contre Holcim, numéro un de l’industrie du ciment, qui prétend ne pas pouvoir faire atteindre ces objectifs.
Notre occupation revendique l’héritage de la ZAD de la colline (colline du Mormont, Eclépens/La Sarraz) et de la contre-expertise du Moulin d’Amour (Vufflens-la-Ville) dans la protection de nos terres et du vivant contre le béton. Nous dénonçons qu’en 2024, le Conseil d’État n’ait toujours pas de plan sérieux pour changer les choses. Nous menaçons désormais d’occuper tous les territoires menacés du Canton jusqu’à l’adoption par l’Etat d’une réelle politique de contrôle de l’industrie du béton.